A l’heure où les réseaux sociaux sont devenus un véritable
phénomène de société, qui ne dispose pas aujourd’hui d’un compte
Facebook ? En tant que parents, nous pourrions être tentés par souci de
sécurité de vouloir être « ami » avec nos enfants sur Facebook afin
de surveiller leurs agissements, leurs fréquentations, ou pour toute autre
raison louable. Est-ce pour autant, une bonne idée ? Quelle est la bonne
attitude à adopter ?
Si l’on en juge les paroles d’experts sur ce sujet, il n’y a
pas de réponse tranchée et tout dépend en grande partie de l’âge des enfants.
Rappelons cependant que le réseau social interdit l’accès
aux enfants de moins de 13 ans. Selon les chiffres de la CNIL (Commission
Nationale Informatique et Liberté) 20 % des enfants âgés de moins de 13 ans
disposeraient pourtant d’un compte Facebook. Cherchez l’erreur ! Dans les
faits, il suffit de préciser son âge au moment de la création du compte…et en
l’occurrence, de se vieillir un petit peu pour accéder au réseau. Rien de plus
facile !
Le premier point important consiste donc, en tant que
parents, à rappeler l’interdit en respectant la règle de l’âge. En effet, si
l’enfant crée son compte avec « la bénédiction » de ses parents, ils
apprennent en quelque sorte à leur enfant à transgresser les lois en devenant
complices du mensonge. Cela n’empêche pas que dans les faits, 97 % des parents
d’enfants de moins de 13 ans sont au courant que leur enfant a transgressé la
règle de l’âge pour pouvoir se créer un compte. Et même que 49 % d’entre eux sont
« amis » avec leurs enfants. Comme le souligne pourtant Serge
Tisseron, Psychiatre : « Facebook est interdit aux moins de 13 ans,
et à mon sens les parents doivent respecter l’interdiction sinon ils envoient
le mauvais signal aux enfants ».
Alors comment faire ? Difficile parfois de résister à
la pression de nos jeunes ados réclamant leur compte Facebook pour faire comme
les copains au risque qu’ils le créent à notre insu…
Si vous autorisez votre enfant à ouvrir un compte dès l’âge
de 13 ans…(ou un peu avant selon vos propres convictions), sachez que Jacques
Henno, Conférencier, spécialiste des nouvelles technologies et auteur de
« Facebook et vos enfants » vous recommande d’être « ami »
avec lui dans le but de l’accompagner et l’aider à faire ses premier pas sur
les réseaux sociaux.
Pour cela, il vous recommande de commencer par lui expliquer
les bases du fonctionnement de Facebook et de paramétrer son compte avec lui.
Concernant Internet, il est important que les enfants acquièrent le plus tôt
possible de bonnes habitudes à propos de leurs données personnelles. Il faut
qu’ils prennent conscience que tout ce qui est publié laisse des traces et les
encourager à utiliser un pseudo afin de protéger leur identité.
Et comme le souligne Serge Tisseron, Psychiatre et
auteur du livre « 3,6,9,12 : apprivoiser les écrans et grandir »
: « Pour internet, ils doivent intégrer très tôt les notions de droit à
l’intimité, droit à l’image et doivent comprendre que sur internet ils ne doivent
pas tout croire. Internet et Facebook ne sont pas un reflet du monde, c’est un
théâtre ! »
Ils doivent intégrer par ailleurs qu’il y a une différence
fondamentale entre la notion « d’amis » sur Facebook et les relations
ou les amitiés qu’ils peuvent tisser dans la vraie vie ; et par conséquent
ne pas accepter d’invitations de personnes qu’ils n’ont jamais rencontrées en
réalité.
Qu’en est-il des enfants plus grands ?
Difficile parfois pour les parents de résister à la
tentation de vouloir être « amis » sur les réseaux sociaux avec leurs
grands enfants. L’accès à leur compte
permet de garder un œil sur leurs agissement, leurs fréquentations, leurs
publications. Si en plus, au moment de l’adolescence, ils ne vous mettent plus
guère dans la confidence et que vous avez le sentiment qu’ils vous échappent
c’est une manière de garder encore un peu le contrôle sur la situation…
Autant Jacques Henno que Serge Tisseron ont pourtant un avis
tranché sur la question : C’est une erreur, même sous couvert de louables
intentions (de surveillance à distance), d’être amis avec ses enfants sur
Facebook au-delà de 13 ans. En effet, ne nous méprenons pas si l’on ne veut pas
qu’il y ait une confusion des rôles : les parents restent les parents et
doivent rester à leur place de parents. Même si l’on sait bien ce que
représente le terme « ami » sur Facebook, les parents ne sont pas les
amis de leurs enfants même sur Facebook !
Par ailleurs, les adolescents, pour se construire et
développer leur personnalité propre, ont besoin que leur intimité soit
respectée. Or, cette incursion des parents dans leur vie privée par le biais de
Facebook les empêche de grandir et de s’autonomiser. Il faudra donc parfois
vous faire un peu violence pour lâcher prise et accepter de ne pas tout savoir
de la vie de votre ado.
Et si vous tenez malgré tout à être ami avec votre enfant
sur Facebook, sachez qu’il est préférable de rester des amis
« inactifs » en vous faisant le plus discret possible. Efforcez-vous
de ne pas commenter ou « liker » chacune de leurs publications. Soyez
vigilants à ce que vous publiez sur votre propre mur et qui pourrait porter
atteinte à leur vie privée. Leurs amis sont leurs amis, ne les demandez pas en
amis. Facebook ne doit pas devenir un outil de communication avec votre ado. Si
vous avez des remarques privées à lui formuler servez-vous pour cela de la
fonction « message privé ». Et surtout, n’émettez jamais de remarques
désobligeantes à son encontre via Facebook. Si vous avez des reproches à lui
faire, faites-lui de vive voix, à la maison.
Pour conclure, rappelez-vous que les ados ont le droit de ne
pas tout vous dire. Même si vous jugez frustrant de ne plus être leur premier
confident, c’est essentiel de respecter leur jardin secret. Autant il est
important de l’accompagner pour faire ses premiers pas sur les réseaux sociaux,
autant il est important de pouvoir s’en détacher ensuite et résister à la
tentation de la surveillance. Comme le souligne Serge Tissseron :
« On n’éduque pas son enfant en le surveillant ou en devenant son
« ami » sur Facebook. Mieux vaut établir un réel lien de confiance
avec eux. De toute façon, sachez-bien que s’ils vous trouvent trop intrusifs,
ils n’hésiteront pas un seul instant à se créer une deuxième page Facebook à
votre insu : une pour les « amis » et une pour les
parents !
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Et pour aller plus loin, si ce sujet vous
intéresse :
- « 3,6,9,12, Apprivoiser les écrans et grandir » - Serge Tisseron – Ed° Erès – 2013 – 136 p – 10€
- « Facebook et vos enfants » - Jacques Henno – Ed° Télémaque – 2012 – 13,80 €
Patricia Cattaneo
Conseillère Conjugale et Familiale à Grenoble
cattaneo.patricia@gmail.com
06 14 76 05 48